Récit de Sekender et sa famille

Récit récolté par l’Observatoire Asile de Marseille

En Italique, les commentaires et précisions des intervieweurs, membres de l’Observatoire.

 

La famille vient d’Afghanistan. Sekender est âgé de 30 ans, il est le père de famille et Florence, sa femme et leur 2 enfants. Leur fille âgée de 4 ans et un bébé âgé de 4 ans. Ils sont arrivés pendant l’été 2017 à Marseille.

Ils sont accompagnés d’Esmat, le petit frère de Sekender âgé de 17 ans et de Radija qui est la sœur de Florence.

Aidés par un compatriote

Quand on est arrivé un homme afghan est venu vers nous à la gare, on les a croisé à la gare et ils nous ont demandé d’où nous venions et nous a emmené à sa maison. Un homme afghan que nous a aidé et nous a expliqué les procédures et nous a montré la route pour aller à la Plateforme Asile.

Nous avons fait la route à pieds de l’Afghanistan. Nous avons traversé des montagnes, nous avons traversés des rivières. Ma femme était enceinte alors, elle me disait laisse moi ici, je ne veux plus avancer.

Florence nous raconte qu’elle a accouché à la frontière entre la Bulgarie et la Serbie, au poste frontière.

C’était un voyage incroyable pour nous, nous ne pouvions croire ce que nous vivions. Nous avons perdu mon frère et ma belle sœur sur le chemin. Nous n’avions pas de téléphone et de contact. Nous nous sommes perdu à la frontière entre Bulgarie et Serbie. Il y avait tellement de monde sur la frontière que la police poussait les gens à avancer. Mon mari et moi nous sommes allé à l’hôpital car j’allais accoucher et quand nous sommes revenus 3 jours après mon beau frère et ma sœur n’étaient plus là…

Avec ma femme, nous avons enregistré notre demande d’asile au GUDA en juillet 2018.

Avant d’avoir un hôtel nous avons attendu 18 jours. Nous dormions, assis dans la rue, sur la place à côté de la Plateforme Asile, sous le porche devant l’université (Halle Puget). Et un jour la Plateforme nous a dit d’aller à l’hôtel. Nous étions avec notre fille et notre fils âgé d’un mois.

La Plateforme nous a dit d’aller à la PASS, nous sommes allés et nous avons tourné, tourné mais nous n’avons jamais trouvé… à cette période mon bébé est tombé malade, il avait de la fièvre et quelqu’un ma dit d’aller à la Timone aux urgences et j’ai fait ça.

Nous sommes à l’hôtel Autocars depuis environ 25 jours.

“Pourquoi tu es dans un centre de déportation?”

Radija et Esmat viennent de nous rejoindre à Marseille. À Toulon ils ont été arrêté. La police a arrêté le train sur lequel ils voyageaient et leur a demandé combien de pays ils avaient traversés et si nous avions donné nos empreintes ailleurs. Ils ont répondu que oui, du coup ils les ont forcés à donner des empreintes, puis les ont placés en centre de rétention.

Nous avons eu l’information par un homme qui était aussi enfermé, un nigérian qui a prêté son téléphone à mon frère. Mon frère a pu nous écrire par le Facebook de cet homme pour nous dire qu’ils étaient dans le centre de déportation à Marseille. J’étais content d’apprendre qu’ils étaient en vie mais j’ai dit “Pourquoi tu es dans un centre de déportation?!?”. Ils étaient à Marseille à Bougainville. Mon frère qui est mineur a été placé au centre de déportation même s’il a dit qu’il était mineur… ils n’ont pas fait attention.

Florence est allé à la Plateforme pour dire que sa sœur et son beau frère sont en centre de déportation et la Plateforme Asile a pris contact avec eux. Ils ont pu sortir du centre.

Radija et Esmat sont allés à la Plateforme, ma sœur a pu avoir un rendez vous au GUDA. Pour Esmat la Plateforme dit qu’il n’est pas possible d’enregistrer une demande d’asile car il a moins de 18 ans. Son souhait est pourtant de demander l’asile.

Sekender l’a postérieurement accompagné à la Préfecture qui lui a donné un rdv.

La famille à l’hotel, Esmat à la rue

La PADA me dit d’aller à l’ADDAP 13, j’y vais avec mon frère 2/3 fois par semaine mais là bas ils ne font rien, juste me faire signer un cahier pour dire que je suis venu. Ils disent qu’ils n’ont pas de place, qu’il y a trop de monde… que je dois dormir dans la rue.

Lors de mon 1er rdv, ils m’ont reçu dans un bureau et m’ont demandé quelle route j’avais fait, comment j’étais venu. J’ai expliqué que j’avais des problèmes de santé. J’ai une balle dans le dos. Il y a un an en Afghanistan il a été blessé. Depuis j’ai des problèmes importants de santé et de mobilité. L’ADDAP 13 m’a dit d’aller à l’hôpital Nord. Je suis allé avec mon frère. Là bas ils ont dit qu’ils allaient nous contacter. Là bas les médecins ont dit qu’ils ne savent pas s’ils peuvent opérer car il y a un risque de perdre l’usage de mes jambes car la balle est très prés de la colonne vertébrale.

Même avec cet important problème de santé l’ADDAP 13 ne m’a pas proposé de solution d’hébergement, ils me disent d’attendre.

Florence nous explique qu’elle a essayé de faire dormir son beau frère dans l’hôtel mais le responsable de l’hôtel à fait sortir le jeune parce que qu’il est interdit. Esmat dort dans la rue en bas des escaliers de la Gare, seul. En face de l’hôtel où est hébergé sa famille.

Nous devons faire face à trop de problèmes.

Pour ma sœur, on a appelé de nombreuses fois le 115 mais ils disaient qu’il n’y a pas de place, ils demandent est ce qu’elle a des enfants et ils disent « sorry we don’t have place », on a essayé tellement de fois, et quand elle disait qu’elle a pas d’enfant ils répondaient qu’il n’y a pas de place… une fois on ne savait tellement pas quoi faire que j’ai dit à ma sœur, dit au 115 que tu as un enfant … comme elle n’a pas d’enfant elle a prit ma fille pour avoir une place en hôtel… nous savons que ça ne marche pas comme ça mais comment faire… ? Je sais que c’est pas bien, nous ne sommes pas habitué à mentir mais nous n’avons pas de solution…C’est trop dur de la voir comme ça… Finalement ma sœur a dit la vérité là où elle dort avec notre fille, et ils ont dit qu’ils allaient réfléchir à ça… qu’il fallait que ma fille revienne avec nous… Ma sœur et ma fille sont très proches… pour nous c’est pas normal de nous séparer, on est une famille…

Ma sœur et mon beau frère sont sans solution.

C’était trop difficile pour nous parce que nous avons aucune solution. Elle était entrain de dormir dehors, nous ne pouvons pas la regarder dormir dehors. Mon beau frère dort aussi dehors.

On veux juste un rendez vous avec l’OFII, pour avoir juste un appartement de deux chambres pour être tous ensemble. Si l’OFII nous aide pour avoir un appartement notre problème sera résolu.

L’OFII ne répond pas au téléphone. Je ne comprend pas pourquoi il y a des familles qui ont eu un appartement avant nous.

Pour manger nous sommes allé au Restaurant NOGA pour 1 mois, puis on a dû arrêter car il n’y avait plus de place. Plus tard on y a eu droit à nouveau, jusqu’à quand nous avons reçu l’ADA, au début du mois d’octobre.

Ma fille me demande tous les jours quand est ce qu’elle va aller à l’école.

Finalement la Plateforme nous a donné le document pour aller chez le docteur (CMU), ils nous ont dit qu’avec ce document nous pouvons aller chez le docteur gratuitement. Ils nous ont aidé à faire les démarches.

 

 

 

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