Récit de Omar et Aicha

Récit récolté par l’Observatoire Asile de Marseille

En Italique, les commentaires et précisions des intervieweurs, membres de l’Observatoire.

Omar et Aicha sont guinéens, ils sont arrivés à Marseille avec leurs 2 enfant âgés de 4 et 6 ans.

Ils nous accueillent dans leur chambre d’hôtel située à Septèmes les Vallons, les enfants sont à l’école. Omar nous propose un café et nous commençons le recueil de leur témoignage, qu’ils ont volontiers accepté de donner.

De la rue à l’hôtel, de Marseille à Septèmes-les-Vallons

Nous sommes arrivés à Marseille en début d’été 2017 et nous avons commencé à faire nos démarches. Nous avons passé la première nuit devant la PADA, il y avait déjà une famille qui attendait et d’autres personnes sont arrivées au cours de la nuit.

Nous avons été reçus le jour même par la PADA, le rendez-vous s’est bien passé, on nous a inscrits pour la demande d’asile : la personne qui nous a reçus nous a remis une lettre avec un rendez-vous en Préfecture à la mi-août.

Ça a été très dur pendant les 3 premiers jours, nous avons dormi dans la rue entre la mairie du 1er et 7ème arrondissement et l’avenue Cantini où nous avons trouvé un banc. Je ne veux même pas en parler… J’ai demandé à un monsieur dans la rue et il m’a expliqué que je pouvais appeler le 115. Il m’a prêté son téléphone, parce que le mien ne marchait plus, je n’avais plus de batterie et j’ai pu joindre le 115. On nous a donné 3 jours à l’hôtel. Le 4ème jour, j’ai demandé à une personne du Samu Social qu’il appelle le 115. Il n’a pas réussi.

J’ai été à la PADA pour qu’on appelle le 115. On m’a répondu : « ll y a des milliers de personnes comme vous, avant on le faisait, mais plus maintenant.  »

Finalement, on a réussi à joindre le 115 et on nous a redonné 6 jours d’hôtel. 2 jours avant que l’hôtel se termine je suis reparti à la PADA et j’ai insisté.

Ils m’ont dit qu’ils envoyaient un message pour nous, mais je ne sais pas à qui, la personne de la PADA a pris mon numéro de téléphone et cette dame a rappelé le 9ème jour à 17h pour me dire que notre demande était acceptée. Et c’est depuis ce jour que nous sommes dans cet hôtel. Je connais un Guinéen qui a dû patienter 40 jours avant d’avoir un rendez-vous à la Préfecture, dont deux semaines à la rue. Finalement il a décidé de partir en Allemagne.

J’ai vu ce qui se passait pour d’autres familles, il y a même des hôtels où il faut acheter des produits pour déboucher les lavabos et les WC. Je ne connaissais rien d’ici. Avant de partir de Libye, nous nous étions préparés, nous avions de l’argent mais tout est parti dans la mer…

A la Préfecture et à la PADA : se battre pour être traité avec respect

Le jour du rendez-vous à la Préfecture nous avons reçu une convocation pour nous présenter un mois plus tard, ils nous ont dit que nous devions revenir le lendemain pour prendre notre attestation de demande d’asile.

Ce même jour, nous avons aussi reçu la carte pour l’argent. On nous a expliqué que nous commencerions à le toucher après 45 jours. Ce premier rendez-vous s’est très mal passé, la personne au guichet de la Préfecture avait un ton très menaçant. J’ai dit que j’allais enregistrer l’échange, alors la dame a changé de ton. Et puis il y a toujours des problèmes de date sur les papiers, des problème d’orthographe des noms, les gens de la Préfecture mélangent les choses et après, ça bloque.

Le lendemain, nous sommes retournés à la Préfecture pour recevoir l’attestation de la demande d’asile et un imprimé : fiche d’observation que nous devions rapporter.

Nous sommes repartis à la Préfecture en septembre 2017 pour notre rendez-vous, on nous a dit ce jour-là que le monsieur qui s’occupe des « Dublin » n’était pas là et que nous devions revenir quelque jour plus tard.

En total, nous avons fait quatre voyages à la Préfecture alors que seulement deux sont en principe nécessaires.

Il n’y avait pas de réponse de l’Italie, le monsieur de la Préfecture nous a expliqué qu’il n’avait pas le droit de prendre notre demande d’asile et qu’il devait  attendre la réponse de l’Italie.

Fin août 2017, nous avons été au rendez-vous que la PADA nous avait donné la première fois que nous nous étions présentés pour avoir des explications sur la procédure d’asile.

Ce jour-là, lorsque nous nous sommes présentés à l’heure du rendez-vous à 13h45, la PADA était fermée. En principe ils ferment à 16h. Je suis revenu le lundi pour avoir un autre rendez-vous, fixé au mercredi.

Ils m’ont donné un rendez-vous quatre jour plus tard à 16h45 : à 17h15, la personne avec qui nous devions avoir le rendez-vous nous a dit qu’elle n’avait pas de rendez-vous avec nous, elle refusait de nous recevoir… J’ai dû changer de ton, je me suis montré volontaire et j’ai dit que je voulais voir la responsable. Finalement, après nous avoir manqué de respect, la personne a accepté de nous recevoir. Mais pendant tout le rendez-vous, cette dame de la PADA n’a pas été correcte, elle est d’ailleurs connue par les demandeurs d’asile pour faire des problèmes.

Septèmes-les-Vallons : entre isolement et solidarité citoyenne

La PADA nous avait donné une inscription au restaurant NOGA, nous avons pu y aller quand nous étions à l’hôtel sur Marseille mais depuis que nous sommes dans cet hôtel à Septèmes ce n’est plus possible d’aller tous les jours à Marseille. Il y a des gens d’ici qui nous amènent à manger, des gens qui apportent du pain, qui préparent des repas, qui donnent. Au début c’était impossible de faire de la cuisine.

Le directeur de l’hôtel met à disposition des personnes un petit local pour la cuisine, une machine à laver, un frigo. J’ai été à la PADA au début, ils m’ont orienté vers la Croix Rouge à la Belle de Mai.

Là, on m’a demandé 5 euros de participation, je leur ai dit que je n’avais que 3,30 euros, ils ont accepté de me donner le colis et m’ont donné un autre rendez-vous fin septembre, mais je n’ai pas osé y retourner, je n’ai toujours pas reçu d’argent et de plus, comme on n’a pas d’argent pour payer le transport, on ne va pas à Marseille. Pour les repas, parfois, il y a beaucoup à partager entre toutes les familles, parfois c’est juste, on garde pour les enfants et nous on boit du café et du sucre. On mange dans la chambre.

Scolariser les enfants

Maintenant les enfants mangent le midi à la cantine : ils ont eu la gratuité une semaine après la rentrée. C’est le gérant de l’hôtel qui nous a beaucoup aidé pour l’inscription des enfants à l’école. C’est un lieu très important pour nous, les institutrices nous ont aidés.

Nous n’avons pas eu de difficulté pour faire soigner nos enfants, grâce à un ami français qui connaissait le système et qui est venu avec moi. C’est grâce à lui que j’ai eu accès à la PASS de l’hôpital Nord. Mais je peux expliquer ce qui est arrivé une nuit lors que j’ai accompagné une maman avec son bébé aux urgences de l’Hôpital Nord ; cette dame ne parle pas le français et son mari devait rester à la maison, ne pouvant pas laisser seuls leurs deux autres enfants. La dame de l’accueil lui demande  «  Où est le papa ? », j’explique qu’il a dû rester auprès des deux aînés. La dame me demande de l’argent, je lui explique la situation, et j’ai été obligé de parler fort…je me suis énervé…On soigne d’abord et après on demande de l’argent. Finalement le bébé a pu être examiné par un médecin qui lui donné une pommade. Mais il a fallu retourner le lendemain avec le directeur de l’hôtel. Cette fois, le bébé a eu une vraie consultation.

 

 

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